Quand je reprends mes esprits je suis dans une boîte. Un carré transparent où je tiens à peine en me recroquevillant. Heureusement que j'ai les articulations bien huilées. Je n'ai pas la place pour remuer quoique ce soit si ce n'est mon museau. Impossible de contacter personne par télépathie et j'ai l'impression que ma prison inconfortable n'y est pas pour rien.
Edwel est accroupit à l'extérieur et me fixe. Je me souviens plus de notre combat mais j'ai la désagréable impression de m'être prise une belle raclée.
Où est Cécie ?
Éliminée.
Tu peux pas l'éliminer tant que Agathodem vit. Son aura démonyaque va être rappelée par son maître sous sept jours.
C'est exact.
Il me dévore sur place du regard avec ses yeux bleus et son air de taré. Je saisis pas le but de la manœuvre et je me demande ce qui m'attend à moi.
Tu vas m'échanger contre quelque chose ?
Les Démons ne souhaitent pas te récupérer et m'invitent à te découper, prendre le temps de te connaître de A à Z. Tu es un spécimen intéressant. Puisque Eirwen m'empêche de négocier directement avec ton propriétaire, je ne vais pas m'en priver. Ne crois pas que ta race de servante démonyaque m'intéresse, c'est plutôt le côté onirique persistant. Quant au petit côté torture que prendront nos séances au fil des jours, ça n'a rien de personnel ... Mais je déteste qu'en plus de me suivre, on se permet d'interagir avec Fikcie.
Hein .. ? La petite fille ? Quel rapport avec toi ?
À demain matin Onolilé. Essaie de dormir.
Il se lève et sort de la pièce qui ressemble à un salon et moi, à une décoration de commode... Avant que je n'entende la porte se refermer je remarque un truc vert et mon sang se glace quand je reconnais Cécie dans une boîte semblable à la mienne à même le sol. Elle a les yeux fermés et ne bouge plus, sa peau se détache lentement de son crâne et de ses mains ...
Mais quand Edwel sort, toutes les lumières s'éteignent et je me retrouve plongée dans le noir, plus aucun bruit.
Je n'ai pas mal, pas de courbature ou de fourmis dans les pattes. Avec les heures je parviens même à réaliser un bel exercice de souplesse et à adopter une position allongée. Mes yeux s'habituent à l'obscurité et je finis par y voir aussi bien que de jour. Le temps est long, je redoute demain. Pour passer le temps je colle ma bouche contre la paroi de ma prison et j'y canalise une petite attaque concentrée de flammes pour essayer de briser ou faire fondre le matériau transparent mais rien n'y fait.
Je commence à m'endormir ... J'essaie de rester éveillée mais je me sens épuisée. Dans la prison de Cécie une légère fumée noire a commencé à se propager, je crois que le processus de rappel aux Enfers est en cours et que c'est son aura démonyaque qui entre en action.
À un moment Edwel est repassé ... Il a collé sa main contre la boîte de Cécie et il s'est mis à marmonner des mots tout seul, le regard vide, avant de se relever et de repartir. À sa deuxième visite, il buvait à la bouteille et est resté immobile dans la pièce pendant de longues minutes à fixer une table avant de resortir.
À sa troisième visite j'ai senti mon cœur se raidir.
Le mage a toujours une bouteille à la main mais il n'entre pas seul ... Dans son dos quelqu'un le suit. C'est Eirwen.
Edwel trace sans sembler rien remarquer et part s'asseoir à la table pour y lire des papiers. Il m'ignore complètement. Je ne sais pas quelle heure il est, on doit approcher de la matinée ... Edwel est donc insomniaque.
Eirwen fait quelques pas, regarde autour d'elle puis me sourit avec un doigt sur les lèvres.
Je me tais mais je suis toute excitée. Je savais bien que ma copine n'allait pas me laisser croupir là-dedans sans rien faire. Je crois qu'elle essaie de me contacter par télépathie mais elle se rend bien vite compte que rien ne passe et je la vois grimacer.
Je me mets à faire des gestes des mains pour essayer de lui demander ce qu'elle fiche mais je m'arrête bien vite parce que Edwel a tourné la tête.
Eirwen se met à pouffer de rire, ah la garce, ça la fait bien marrer de me voir bloquée dans un cube à essayer de communiquer en langage des signes. Elle en a presque des larmes. Je lui jette mon regard le plus noir et elle s'arrête.
Elle s’assoit en tailleur face à moi. Je soutiens son regard. Je crois qu'elle essaie de canaliser une illusion capable de passer au travers de la boîte mais celle-ci se met à chauffer, de plus en plus, si bien que mon poil commence à fumer. Je fais un vif non de la tête pour qu'elle comprenne et s'arrête. Ok, Edwel avait donc prévu une éventuelle visite de Eirwen et je suis dans une prison conçue pour bloquer et emmagasiner toute intrusion psychique.
Je lis un éclair d'agacement chez elle. Je me demande pourquoi elle n'attaque tout simplement pas Edwel pendant qu'il a le nez dans ses papiers, ça me semble évident qu'elle pourrait le tuer en moins de dix secondes et je désigne le mage d'un coup du menton mais pas de réaction. La sorcière ne compte pas attaquer Edwel... Et pire encore. Elle finit par se relever ... et me laisser là. Je griffe mon cube folle de rage mais elle est plus là.
Elle laisse tomber ?!